Togo : promouvoir l’écoconstruction

Juin 3, 2021 - 06:00
Novembre 23, 2021 - 15:21
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Togo : promouvoir l’écoconstruction
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L’architecture n’est pas une écriture banale. Chaque contexte a son architecture qui reflète la valeur et la culture de toute population qui s’y identifie. Ce sont les motifs qui sous-tendent la promotion de l’architecture locale par les concepteurs de construction dans divers pays du monde. S’inspirant de leurs racines et de leur culture, ces concepteurs se servent des matériaux locaux et des techniques modernes pour réaliser des habitats à moindre coût.

« Il n’y a pas de recettes miracles. Il faut, tout simplement, que cette architecture s’adapte au milieu dans lequel elle évolue, en adoptant les matériaux locaux disponibles comme la terre et la pierre »,relève M. Essozinam Batcha, coordonnateur du Projet d’Appui aux Métiers de la Pierre et de l’Eco-construction (PAMPEC). « Ces matériaux pourraient résister aux conséquences néfastes du changement climatique, à la sécheresse, à la chaleur intense qui se manifeste, de nos jours, dans tous les pays du monde et surtout en Afrique » ajoute-t-il.

Cette assertion est comparable aux édifices hérités de l’architecture africaine d’hier, notamment soudanaise, comme les grandes mosquées, les palais royaux de nos pays qui ont pu justement résister aux temps. La résistance de ces vieilles architectures aux intempéries démontre que si la technique de mise en œuvre de ces ouvrages est maitrisée, les bâtiments peuvent tenir longtemps surtout lorsqu’elles sont entretenues régulièrement. Encore, faut-il que ces techniques de construction soient entièrement connues et divulguées.

Des collèges de promotion de l’écoconstruction

L’enseignement de l’écoconstruction au Togo fait son chemin depuis l’année scolaire 2015/2016, au Collège d’Enseignement Technique (CET) de Pya, dans la région de la Kara et au Centre Régional d’Enseignement Technique et de Formation Professionnelle (CRETEFP) de Dapaong, dans la région des Savanes. Les deux régions précitées regorgent suffisamment des matériaux de base que sont la terre et la pierre. 

L’accès à la formation

L’apprenant de dix-huit à trente ans doit être préalablement formé en maçonnerie afin de pouvoir s’insérer plus facilement dans la théorie et la pratique de l’écoconstruction. « Trente-six élèves dont six filles du CET de Pya sont déjà sortis (en 2020) nantis de leur Brevet de Technicien en Génie civil,avec une attestation qui les qualifie aux métiers de la pierre. Au CRETEFP de Dapaong, ce sont 66 jeunes garçons et filles de la 5ème promotion qui s’apprêtent à terminer leur formation de trois ans » précise le coordonnateur du projet qui souhaite vivement l’insertion professionnelle des jeunes dans le secteur du bâtiment,par le« développement d’une offre nouvelle de formation et la mise en place d’un dispositif de suivi d’insertion et d’appui au développement de la filière éco-construction dans les régions de la Kara et des Savanes ».

Des résultats palpables

Les encadreurs expriment leur satisfaction quant aux prestations des jeunes formés qui sont déjà actifs sur le terrain. Ces mêmes responsables apportent davantage à ces jeunes qu’ils s’efforcent de regrouper pour plus d’efficacité. « En dehors de la maçonnerie proprement dite, ils peuvent valoriser une autre technologie (l’éco-construction) sur le marché du travail. Le complément de formation leur permet aujourd’hui d’être plus coptés par les entreprises ». Des entreprises de génie civil en ont d’ailleurs recruté pourla réalisation de bâtiments scolaires et des charbonnières à Dapaong-ville et dans la localité de Tami, dans la région des Savanes. « Je crois que nous avons l’occasion de vulgariser davantage la technique de l’écoconstruction. Nous ne sommes qu’au début, et beaucoup de personnes nous découvriront ».

Des communes visées

Les responsables du PAMPEC font le tour des communes des régions concernées pour la promotion de l’écoconstruction. « Nous allons, en ce moment, vers les mairies des deux régions (Savanes et Kara), en sachant que chacune d’elles est appelée à se développer avec ses propres ressources, dans le cadre de la politique de communalisation lancée par le ministère de l’administration territoriale. Ces communes ont à y gagner en valorisant les ressources locales à partir desquelles elles peuvent tirer profit. Nous allons mettre des groupements d’extraction sur des sites qui généreront des taxes payées pour les communes ». C’est un avantage pour les mairies en question tout comme les extracteurs qui seront payés, et les résidents qui vont débourser moins pour construire leurs habitations. « Les populations doivent l’adopter parce qu’on n’a pas besoin de dépenser beaucoup de ressources financières. Il suffit d’avoir la terre, les pierres et la latérite, et le bâtiment est debout », se plait à affirmer M. Essozinam Batcha.

L’espoir en vue pour les promus ?

Les encadreurs des collèges techniques ne manquent pas de promouvoir les élèves sortants auprès des patrons d’entreprises. « Nous maintenons une relation étroite avec les élèves qui ont terminé leurs études à travers des descentes régulières sur le terrain où ils sont.        Ils font du bon travail. Nous négocions toujours pour leur trouver des chantiers à valoriser, notre préoccupation actuelle étant d’amener ces jeunes à s’insérer sur le marché du travail ». Les techniques sont là et prouvées. Mais, il reste à convaincre à l’investissement dans l’écoconstruction ».

Selon M. François Jacquier, Directeur de l’Agence Française de Développement (AFD) pour le Togo : « L’objectif principal du projet est de favoriser l’emploi des jeunes à travers le recours à des matériaux locaux pour des bâtiments durables ; 100% ODD ».

Le projet éco-constructionqui vise à améliorer le développement économique et social des artisans et des jeunes est appuyé par l’AFD et l’organisation non-gouvernementale \"Acting for life\". Il s’étend également au Bénin et au Mali. 

Jacques Sourou DOUTI Journaliste, Consultant en communication pour le développement | Directeur de publication de Nzaranews