Togo-Interview : l’UK impulse l’éducation financière aux communautés de base

Le développement humain durable. Telle semble être l’idée murie par l’Université de Kara (UK), en créant des espaces de diffusion de la culture d’activités génératrices de revenus, dans des dizaines de localités de la Région de la Kara. La démarche a permis la naissance du "Programme Campus citoyen" qui s’apparente à l’expression de résilience des membres de groupements, pour faire face aux défis de l’heure. Pour en savoir plus, Nzaranews s’est entretenu avec BOZIKE Passima, Attaché d’administration au Cabinet du Président de l’UK, coordonnateur adjoint du Programme.

Decembre 19, 2022 - 12:38
Decembre 20, 2022 - 13:22
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Togo-Interview : l’UK impulse l’éducation financière aux communautés de base
BOZIKE Passima, Attaché d’administration au Cabinet du Président de l’UK

Nzaranews : quelles sont les raisons qui ont amené l’UK à prendre l'initiative en faveur de l’éducation financière ?

BOZIKE Passima  : L’Université de Kara, se définit comme une université au service de la communauté, et c’est pour cela qu’elle y réfléchit constamment pour se rendre utile. Elle veut surtout amener les populations à saisir les opportunités d’autopromotion mises en place par le gouvernement pour tirer le maximum de bénéfices des mécanismes de financements disponibles.

Nzaranews : qu’est-ce que le "Programme Campus citoyen" ?

BOZIKE Passima : Il s’agit d’organiser les populations en Groupement de crédit communautaire. Concrètement, il s’agit d’un groupe mixte ou non de vingt (20) à trente (30) personnes qui épargnent sur une base hebdomadaire et, au bout de trois (03) mois, s’accordent des crédits avec un taux d’intérêt de 5%, pour créer ou consolider leurs activités génératrices de revenus.

A côté de ce fond, il y a aussi le "Fond de solidarité" qui permet aux membres de s’accorder des crédits de solidarité, avec un taux d’intérêt de 0%, pour s’apporter de l’assistance lors de maladies, d’accidents, de scolarisation….

En dehors des activités d’épargne, les membres des groupements bénéficient de formations en matière de création, de consolidation et de gestion d’activités génératrices de revenus (AGR).

Nzaranews : quelles sont les catégories sociales, concernées par cette éducation financière ?

BOZIKE Passima : Les hommes et les femmes impliquées dans différentes sortes d’AGR sont concernées par cette éduction financière initiée depuis mars 2018.

Nzaranews : combien de localités/villages relèvent aujourd’hui de l’initiative ?

BOZIKE Passima : Tous les 15 cantons de la Préfecture de la Kozah et ceux de Broukou et Siou, dans la Préfecture de Doufelgou, avec au total 149 groupements impliquant près de sept mille (7000) personnes, majoritairement des femmes.

Nzaranews : n’est-ce pas que la méthode ressemble à celle des Associations villageoises d’épargne et de crédit ?

BOZIKE Passima : Ces groupements de l’Université de Kara sont différents sur certains points d’activités : dans le cas dont nous parlons, la caisse dispose de trois (03) clés et les accessoires sont offerts par l’UK qui prend également en charge les formateurs et animateurs des groupements ; puisque ces groupements bénéficient de formations et d’accompagnement technique dans la gestion des AGR.

Nzaranews : quelles sont les structures qui vous appuient dans la sensibilisation et l’encadrement des adhérents ?

BOZIKE Passima : Une équipe est mise en place au niveau du "Programme campus citoyen" pour l’accompagnement des groupements. La sensibilisation a été faite en 2018 avec la constitution et l’installation de quatre (04) groupements dans les cantons de Yadè, Soumdina, Tchitchao et Awandjelo. Par la suite, les populations, appréciant les effets bénéfiques des membres des différents regroupements, ont demandé et obtenu l’appui de l’UK qui leur a apporté la logistique nécessaire, avant de les organiser en groupements de crédit communautaires.

Les Chefs de cantons et villages sont régulièrement invités à prendre part aux assemblées générales des groupements.

Nzaranews : vous aviez certainement eu des difficultés au moment d’organiser les adhérents ! Lesquelles ?

BOZIKE Passima : Les difficultés sont plus liées la capacité à satisfaire les nouvelles demandes qui sont de plus en plus croissantes.

Nzaranews : alors peut-on parler aujourd’hui de succès ?

BOZIKE Passima : C’est un succès, eu égard à la progression du nombre de groupement qui est passé de quatre (04) en 2018 à cent quarante-neuf (149) en 2022, avec près de 7 000 adhérents aujourd’hui. L’impact socioéconomique dont bénéficie les populations bénéficiaires en est une preuve. Chacun excelle dans son domaine de nos jours.

Nzaranews : pensez-vous que c’est à travers uniquement le mécanisme "Education financière" que les femmes peuvent s’autonomiser ? De même que les hommes ?

BOZIKE Passima : Ces groupements sont mixtes ; donc composés de femmes et d’hommes. L’approche de l’UK permet une forte autonomisation des femmes et des hommes impliqués dans les activités d’épargne et de crédit.

Nzaranews : quel est, selon vous, l’avenir de l’éducation financière dans le milieu ?

BOZIKE Passima : Il y a de belles perspectives ! Et nous pensons que la prochaine étape consisterait à mettre en place un système de couverture maladie et d’organisation des bénéficiaires, propriétaires d’unités semi-industrielles de production et de transformation agroalimentaires.  

Nzaranews : comment la définissez-vous l’insertion sociale des communautés à la base par rapport à la vision de l’Université de Kara ?

BOZIKE Passima : L’insertion sociale est relative à la capacité des membres des groupements à valoriser leurs propres capacités, pour ensuite prendre en charge leur ascension sociale. C’est un concept qui permet d’encourager les bénéficiaires à développer leurs capacités et compétences pour qu’ils deviennent utiles à eux-mêmes et par la suite avoir des échanges bénéfiques avec les autres composantes de la population et avec son environnement.

Nzaranews : est-ce les mêmes catégories sociales que celles de l’éducation financière qui sont concernées ? Expliquez-nous !

BOZIKE Passima : Les membres des groupements initiés par l’UK bénéficient de l’éducation financière et de l’accompagnement vers une insertion sociale. Les deux concepts sont développés au même moment. L’éducation financière se fait à partir des activités d’épargne et l’inclusion sociale se fait à travers des causeries-débats.

Nzaranews : quelle différence faites-vous ici entre insertion sociale et intégration sociale ?

BOZIKE Passima : L’insertion sociale est relative à la capacité pour chaque membre à se considérer comme responsable de lui-même et qu’il devrait se développer avant d’attendre une quelconque aide extérieure.

L’intégration sociale permet aux membres se s’accepter dans leur différence et accepter et faciliter des interaction économique et sociale dans la communauté. Les deux conjugués, favorisent le vivre ensemble.

Nzaranews : comment est favorisée l’insertion sociale dans les milieux ? Et les indigents dans tout cela ?

BOZIKE Passima : Pour favoriser l’insertion sociale, les groupements bénéficient de causeries-débats autour des thématiques sociales. C’est un cadre interactif, où chaque membre donne son avis sur le sujet puis une synthèse est faite à la fin, pour que chacun rentre chez lui avec une leçon apprise. Les changements de comportement positifs ont amené beaucoup de maris à devenir membres des groupements.

Pour les indigents, nous les encourageons à devenir membres des groupements, car ils sont libres d’épargner, même avec 50 francs par semaine.

Nzaranews : la question de l’inclusion sociale au sein des villes constitue un défi. Comment vous y prenez-vous ?

BOZIKE Passima : En ville, il y des groupements de crédit communautaire. L’évolution des effectifs n’est pas la même que celle qui est courante dans les communautés à la base. Nous essayons, de notre côté, d’organiser les personnes par secteurs d’activités.

Nzaranews : à ce jour, quel jugement de valeur faites-vous, quant à la réussite de l’inclusion sociale des communautés à la base, dans les localités que vous aviez ciblées au départ ?

BOZIKE Passima : L’Université de Kara se félicite d’avoir initié le "Projet Inclusion financière et insertion sociale" dans les communautés à la base, car sa mission des services à la communauté est valorisée. L’Université de Kara devraient être soutenue dans sa dynamique de recherche-action, afin que les populations bénéficient de plus en plus des résultats des recherches universitaires. 

Nzaranews : quelles perspectives envisage l’UK dans l’éducation financière et l’inclusion sociale des communautés à la base dans la région ?

BOZIKE Passima : Etendre la zone de couverture à d’autres préfectures de la région. Mettre en place un système de couverture santé.

Nzaranews : Merci, Monsieur Bozikè Passinam

BOZIKE Passima : Je vous en prie, c’est moi qui vous remercie.

 

Jacques Sourou DOUTI Journaliste, Consultant en communication pour le développement | Directeur de publication de Nzaranews