Togo-Incendie du marché d’Agoè-Assiyéyé : les interrogations et commentaires continuent !
Étonnant, difficile à comprendre, à expliquer, à imaginer, à croire ! Après le marché d’Agoè-Assiyéyé, dans la banlieue nord de Lomé, un autre magasin a brulé dans l’intervalle de quatre jours à Kara, chef-lieu de la préfecture de la Kozah, à 420 kilomètres de la capitale, le 25 décembre 2023. Des questions et des commentaires circulent abondamment. Les différentes catégories de personnes pointent sans détour une défaillance des sapeurs-pompiers et plusieurs manquements, alors qu’une enquête a été ordonnée par le gouvernement pour déterminer les causes des incendies.
Plusieurs sont ceux-là qui interpellent les services spécialisés qui, disent-ils, "n’étaient pas intervenus avec promptitude", estimant "trop long" le temps d’intervention des sapeurs-pompiers. Dans ce cas précis, Hubert A. fonctionnaire, estime qu’"avant de crier pour réclamer des sapeurs-pompiers dans toutes les maisons au Togo, il faut d'abord rechercher les causes profondes des incendies de marchés dans nos pays. Il n’est pas exclu qu'un marché prenne feu par la méchanceté d’une tierce personne".
Dans cette logique, un autre observateur, ex-cadre d’une compagnie aérienne panafricaine, Matthieu H. trouve "curieux" que le marché d’Agoè-Assiyéyé brûle à la veille des fêtes de fin d’année. Et de se demander "pourquoi en Afrique, les grands marchés ont toujours tendance à prendre feu", se référant à des cas antérieurs comme "il n’y a pas longtemps, à Accra au Ghana, Bamako au Mali, Libreville au Gabon, Bouaké en passant par Abidjan en Côte-d’Ivoire, Lomé etc., où des marchés ont pris feu".
Dépassionner le débat
Des techniciens contactés par Nzaranews pensent qu’il faut d’abord "dépassionner le débat" pour poser les vraies questions. "Pourquoi n’avait-on pas prévu des dispositions de détection et de protection automatique d’incendie au niveau de nos marchés, étant donné que le feu est l’un des risques sécuritaires majeurs dans les marchés, surtout lorsqu’on sait qu’il y a déjà eu des antécédents ?", s’interrogent-ils. "Les maitres d’ouvrage, avaient-ils rédigé puis fait valider le cahier des charges de construction de ce marché ?", se demandent-ils avant de préciser : "sinon, il faut que des dispositions de protection contre le feu figurent dans les cahiers des charges de ces marchés. On ne peut pas être en retard à ce point ! C’est inexplicable".
L’un des interlocuteurs de Nzaranews, Cédric Yen, souhaite que "les autorités ou les principaux responsables proposent des textes de lois pour exiger ce genre de choses, s’il n’y en a pas encore. Tant que ce n’est pas réglementé, il n’y aura pas de contraintes. En plus, la réactivité des sapeurs-pompiers est à revoir ainsi que leur dimensionnement. Il y a probablement un manque de moyens matériels et humains".
Les responsables politiques, eux, exhortent le gouvernement à diligenter une enquête "sérieuse pour déterminer les causes réelles" de cet énième incendie et de prendre toutes les mesures qui s’imposent.
Des commentaires alambiqués ?
Un confrère a rapporté qu’un témoin, interrogé par rapport à la recrudescence des incendies dans les lieux de commerce, aurait affirmé après l’incendie du marché de Kara que "les commerçants doivent arrêter de nous fatiguer avec les parodies d'incendie qu’ils nous servent, le plus souvent en fin pour s'acquitter de leurs sacrifices de fin d'année".
Dans des lieux publics, chacun y va avec ses appréhensions. Albert Foli, conducteur de taxi-moto pour qui "aucune piste ne doit être négligée", explique qu’"en ces temps de djihadisme à tout va dans la sous-région, les grands marchés du pays devraient de jours comme de nuits être sous une surveillance vigilante accrue".
D’autres se demandent si l’incendie qui a ravagé le marché n’est pas la réponse à la manifestation quelques jours plus tôt des revendeuses qui s’élevaient contre "des rackets policiers et plus d’espace" sur la place du marché. Pour eux, "le timing est louche".
Fort de leurs croyances, quelques superstitieux justifient le drame d’Agoè-Assiyéyé par le fait que le marché a été construit sur un ancien cimetière. Ce qui nécessitait certaines cérémonies qui auraient été "négligées". "C’est peut-être la colère des divinités", supputent-ils.
Prendre des précautions nécessaires
Dans un communiqué daté du 22 décembre 2023, le gouvernement du Togo a saisi l’occasion pour rappeler aux uns et aux autres de veiller à « prendre des précautions nécessaires et d’éviter au maximum des comportements générateurs de sinistre dans tous les établissements publics et privés ».
En janvier 2013, le marché de Kara et le principal bâtiment du marché d’Adawlato, le plus grand marché de la capitale, avaient été ravagés par des incendies qui, selon les autorités, ont occasionné des dégâts matériels estimés à près de 6 milliards de francs CFA. Il n’y avait pas eu de perte en vie humaine, mais les boutiques de 3 106 commerçants (2 225 pour Lomé et 881 pour Kara), ont été dévastées.